Ils deviennent omniprésents dans notre quotidien. Les objets connectés se retrouvent sous forme de gadgets telle la bouteille d’eau intelligente. De façon encore plus fréquente sous forme de bracelets ou maillots de sport qui gardent le compte de nos activités physiques et de notre rythme cardiaque. Leur point commun; ils amassent une masse grandissante de données sur différents aspects de notre quotidien et les transmettent à un serveur.
D’ici 2020, on peut s’attendre à ce que plus de 20 milliards d’objets connectés soient en circulation. Ils généreront des pétaoctets de données ayant la capacité de tracer un portrait de chaque minute de notre quotidien. Dans leur ensemble, l’analyse de ces données révélera des informations qui permettront aux fabricants d’optimiser leurs produits. Ce qui fait saliver les analystes marketing encore plus abondamment par contre est l’analyse au niveau de l’individu de ces données.
Nombreux analystes, dont ceux de McKinsey, évoquent une 4ième révolution industrielle. Ils prévoient une société où tous les produits et services vendus seront personnalisés afin de répondre aux besoins de chaque consommateur. Ce qui implique que le marketing de masse se fera au niveau de l’individu et non d’un segment.
Le message sera personnalisé en fonction du profil de l’individu, de son environnement, du contexte voir même du moment. De toute évidence, il ne sera pas créé par un humain puisque nous n’avons pas la capacité d’assimiler et de traiter une telle quantité de données à la vitesse requise. En ce qui a trait aux divers modes de livraison des messages publicitaires, je vous laisse les imaginer.
En poussant cet exercice de prospective à sa limite on peut même en arriver à la conclusion qu’une intelligence artificielle filtrera les messages publicitaires et ne laissera passer que ceux qui correspondent à nos besoins et désirs conscients voir même inconscients.
Revenons du monde de la science fiction et regardons comment nous effectuons le marketing des objets connectés aujourd’hui en examinant les stratégies du bracelet Fitbit et du thermostat intelligent d’Alphabet (Google), le Nest.
On pourrait penser que Google, champion du big data, serait avant-gardiste dans la commercialisation du Nest. En fait, il n’en est rien. Alphabet a embauché en 2013 Doug Sweeny, ancien VP marketing de Levis (les jeans), afin de commercialiser le Nest. Non seulement Sweeny ne veut-il pas exploiter les données d’utilisation amassées par Nest dans sa stratégie marketing il opte pour une stratégie des plus traditionnelles pour un produit de grande consommation. Nest focalise depuis les dernières années, quasi uniquement, à croître son réseau de distribution physique (et non en ligne). Nest fait peu de publicité dans les médias et n’a aucune stratégie de marketing personalisé.
Quant à Fitbit, cotée en bourse depuis 2015, sa stratégie marketing est beaucoup plus évoluée et exploite, bien que de manière limitée, les données amassées par ses utilisateurs.
Fitbit utilise ses données pour développer sa gamme de produits qui compte près d’une dizaine de bracelets. Fitbit déploie également des campagnes marketing hautement personnalisées en adaptant le contenu de chaque courriel qu’elle envoie à ses millions de clients.
De plus, Fitbit inclut dans sa stratégie le marketing communautaire. Outre sa communauté Facebook principale, avec près de 1.5 million de j’aime, Fitbit anime également des communautés pour chacun de ses produits sur de multiples plateformes de médias sociaux. Fitbit commandite aussi de nombreux événements sportifs et créé du contenu numérique destiné à être rediffusé par ses utilisateurs.
Il y a plusieurs autres stratégies marketing particulièrement bien adaptées pour le marketing des objets connectés tel le marketing prédictif, le marketing en temps réel et le co-marketing qui ne sont encore que peu ou pas utilisées dans ce secteur.
Les principaux freins au déploiement de stratégies marketing plus avant-gardistes par les fabricants d’objets connectés sont :
- La perception des consommateurs de l’utilisation de leurs données à des fins de commercialisation
- La convergence requise des compétences statistique, informatique, analytique, psychologique, sociologique et marketing
- L’Absence de formation des analystes marketing dans les stratégies de commercialisation utilisant les données de masse (big data)
- Le coût élevé des infrastructures et applications nécessaires à l’analyse de la modélisation des données
Les trois derniers freins expliquent également pourquoi les fabricants d’objets connectés utilisent principalement des fournisseurs externes pour analyser les données et développer leurs stratégies marketing.
Il est évident que le marketing des objets connectés en est encore qu’à ses balbutiements. À défaut d’une innovation de rupture dans le domaine, il faudra attendre de nombreuses années encore avant de voir le marketing des objets connectés se différencier substantiellement du marketing courant.