L’innovation nait de la créativité, qui on l’a vu dans le billet précédent, relève plus de l’effort que de l’inspiration. Il n’en demeure pas moins que la créativité nait à partir d’une idée, bonne ou mauvaise. De toute évidence, on préfère les bonnes idées puisqu’elles demanderont moins de travail à être converties en produits ou services novateurs.

En lisant How to Fly a Horse, de Kevin Ashton, je me suis rapidement demandé ce qui distinguait une bonne idée d’une mauvaise, dans le cadre du processus créatif.

Qu’est-ce qu’une bonne idée?

Ashton ne répond pas à la question directement mais, en refermant le livre à la dernière page j’avais tout de même une réponse. Je l’ai trouvé entre les lignes.
Une bonne idée est relative et perceptuelle. Elle est fonction de :

  1. Sa popularité
  2. Son coût (économique et social) versus ce qu’elle rapporte
  3. Le point de vue de la personne qui évalue l’idée

Un exemple serait le stade olympique de Montréal. En termes de succès social, le stade est maintenant un emblème de la ville. L’image du stade est associée à Montréal, autant que celle de la tour du CN l’est à Toronto. Empiriquement, son coût de construction et d’entretien depuis près de 40 ans surpassent largement toutes les retombées économiques qu’il a pu rapporter. En ce qui a trait à la perception, certaines personnes adorent le stade, alors que d’autres le voient comme un gouffre financier.
Il faut donc garder en tête ces distinctions lorsqu’on tentera de juger si notre idée, ou celle d’un autre, est bonne ou non.
Ce qui nous amène au cœur de notre sujet, les facteurs qui stimulent notre créativité. On les dénombre par dizaines. Voici 4 stimuli adressés par Kevin Ashton dans How to Fly a Horse.

1 – Alimenter la créativité

Une bonne idée ne vient pas de rien. Elle émane nécessairement de connaissances, expériences ou d’idées préalables. S’exposer constamment à de nouvelles informations, expériences et idées différentes des nôtres sont donc d’excellentes façons de faciliter la génération d’idées nouvelles.

2 – L’expérience

Avez-vous remarqué que très souvent les personnes qui on eu de bonnes idées dans le passé sont ceux qui en génèrent le plus au présent? On a tendance à les catégoriser comme des créatifs.
Deux phénomènes sont en jeu ici. Dans un premier temps, les individus quoi ont le plus d’expérience à générer de bonnes idées (dans un domaine précis) identifient rapidement les idées qui leur permettront d’atteindre leur objectif avec le moindre effort. Ce phénomène a été observé des centaines de fois, dont lors d’une expérience effectuée par le psychologue Adrian de Groot. L’expérience a été menée auprès de joueurs d’échec de différents calibres à qui on présentait le même échiquier et on demandait d’évaluer la stratégie optimale (demandant le moindre nombre de coups) pour vaincre l’adversaire. Systématiquement les joueurs moins expérimentés évaluaient beaucoup plus d’alternatives avant d’en arriver à la stratégie optimale (lorsqu’ils y arrivaient). À chaque échiquier présenté, les maîtres n’évaluaient que peu d’alternatives avant d’en arriver à la stratégie optimale. L’expérience semble permettre à notre cerveau de faire une présélection avant même de considérer une problématique. Plus nous avons d’expérience à être créatif, plus nous devenons des créateurs efficients à produire de bonnes idées.

Créativité - Baker MarketingLe second phénomène est celui de la renommée. Plus un individu possède une grande renommée, plus il a de chances de générer de bonnes idées (dans son secteur d’activités).

Quelques facteurs expliquent cette observation. D’abord la popularité du créateur se transfère à son idée. Ensuite, la confiance que lui témoigne son environnement lui permet une plus grande marge de manœuvre. L’individu ayant déjà fait ses preuves on lui accorde plus facilement le bénéfice du doute. Une autre explication est que ce type d’individu attire les bonnes idées d’autres créateurs. Ces derniers préfèrent la lui confier afin d’en accroître les chances de succès.

3 – Le travail individuel

Le travail individuel est également un meilleur catalyseur de bonnes idées que le travail en groupe. De nombreuses études, peu reconnues dans les médias en raison d’un courant contraire, démontrent que les traditionnelles sessions de brainstorming en groupe génèrent non seulement moins d’idées par tête de pipe mais des idées de piètre qualité comparativement aux sessions en solo. Ashton n’a pas exploré les raisons de cette conclusion. Une étude conduite par des professeurs Néerlandaise s’y est cependant attardée et conclue que les règles de communication propre à la dynamique de groupe et la crainte du jugement d’autrui sont les principaux facteurs qui expliquent pourquoi le brainstorming en groupe est moins efficace.

4- L’action avant toute chose

Finalement, possiblement le plus important des stimuli de cette liste, l’action favorise la créativité significativement plus que la parole.
Nous savons tous que les enfants sont plus créatifs que les adultes. Un groupe de chercheurs sur la créativité a voulu savoir pourquoi. Ils ont demandé à des enfants de 5 et 6 ans, des avocats et des étudiants en administration de construire la plus haute tour autoportante possible en 8 minutes ou moins. Pour ce faire, on leur a donné une guimauve, des spaghettis, de la ficelle et du ruban à masquer.

Vous l’aurez deviné. Les tours bâties par les enfants étaient les plus hautes de toutes et celles des étudiants, plus hautes que celles des avocats. En examinant le processus créatif des trois groupes, les chercheurs ont observés que les enfants agissent en parlant, alors que les étudiants et juristes réfléchissent et parlent (l’ordre varie en fonction de l’individu) avant d’agir.

Dès leur entrée dans la pièce, les enfants ont commencé à manipuler le matériel pour résoudre le problème. Ils verbalisaient leurs actions et apprentissages au fur et à mesure. Les deux autres groupes ont d’abord échangé verbalement sur les différents plans d’action possibles avant de commencer à exécuter. Les chercheurs ont également observé que les groupes d’avocats, dont le plan initial ne fonctionnait pas, ont pris plus de temps à rebrousser chemin et refaire un autre plan que les étudiants en administration.
Ce biais envers l’action se retrouvent dans la méthodologie Lean Startup où on commence d’abord par créer une expérience sur le terrain afin de valider notre hypothèse d’affaires.
Je vous invite, à la prochaine occasion où vous devrez faire preuve de créativité, de mettre en action la première idée qui vous viendra. Vous pourrez alors juger de l’efficacité de cette façon de faire vs votre approche traditionnelle.

Le prochain billet de cette série s’attardera sur les facteurs qui bloquent la créativité.